Le fabricant d'armes stéphanois Verney-Carron, dernier grand nom français de la production d'armes de petit calibre, fait face à des difficultés financières majeures. Après plusieurs mois de tensions économiques, l’entreprise a annoncé sa cessation de paiement et a demandé son placement en redressement judiciaire. Cette situation met en lumière les défis auxquels est confrontée l’industrie armurière française.
Un redressement judiciaire pour restructurer l’entreprise
Verney-Carron, fondée en 1820, est connue pour ses fusils de chasse et ses armes non létales. Depuis son rachat en 2022 par Cybergun, un spécialiste des armes d’airsoft et non létales, l’entreprise tentait de retrouver un équilibre économique. Cependant, la baisse de la demande pour les armes de chasse et l’arrêt progressif de l’utilisation des Flashballs par les forces de l’ordre ont pesé sur les comptes de l’entreprise.
Face à ces difficultés, Cybergun a injecté 12 millions d’euros pour maintenir l’activité de Verney-Carron, sans pour autant parvenir à redresser durablement la situation. L’entreprise affiche une perte de 4,54 millions d’euros pour un chiffre d’affaires de 5,45 millions d’euros en 2023.
Le tribunal de commerce de Saint-Étienne doit examiner la demande de redressement judiciaire le 12 février 2025. Cette procédure permettrait à Verney-Carron de geler ses dettes et de rechercher des solutions pour assurer la continuité de son activité.
Un repositionnement stratégique fragilisé par un contrat incertain
Pour faire face aux mutations du marché, Verney-Carron avait tenté de se repositionner sur la fabrication d’armes de guerre de petit calibre. En novembre 2023, un contrat de 36 millions d’euros pour fournir des fusils d’assaut, fusils de précision et lance-grenades à l’Ukraine avait été annoncé, mais il n’a finalement pas été concrétisé. Ce contrat représentait une opportunité importante pour améliorer la situation financière de l’entreprise.
En parallèle, Verney-Carron doit encore faire face à une échéance de 500 000 euros prévue pour octobre 2025, ce qui accentue la pression sur sa trésorerie. Depuis décembre 2024, la majorité des 70 salariés de l’entreprise a été placée en activité partielle pour trois mois.
Une recherche de partenariat pour éviter la disparition
Dans un communiqué, Cybergun a indiqué être en discussions avancées avec un acteur majeur de l’armement de petit calibre au niveau mondial pour un éventuel partenariat industriel. Bien que le nom du potentiel investisseur ne soit pas officiellement dévoilé, plusieurs sources évoquent le groupe belge FN Browning comme un candidat sérieux.
Si un partenariat est conclu, Cybergun resterait actionnaire minoritaire de Verney-Carron, tout en continuant à soutenir financièrement l’entreprise si nécessaire. L’objectif est de trouver un adossement industriel capable d’assurer la pérennité de l’armurier français.
Une industrie en déclin ou une opportunité de relance ?
La situation de Verney-Carron soulève des questions plus larges sur l’avenir de l’armurerie française. L’entreprise représente l’un des derniers fabricants d’armes de petit calibre en France, un secteur qui a vu de nombreux acteurs disparaître au fil des années. La dépendance croissante du pays aux grands groupes internationaux pour la production d’armes militaires et civiles pose la question de la souveraineté industrielle.
L’issue du redressement judiciaire et des négociations en cours sera déterminante pour l’avenir de Verney-Carron. Si aucun repreneur n’est trouvé, l’armurier pourrait cesser définitivement son activité, marquant ainsi la fin d’une tradition armurière bicentenaire en France.
Un impact direct sur les chasseurs et les utilisateurs d’armes Verney-Carron
La mise en redressement judiciaire de Verney-Carron inquiète également les chasseurs et les passionnés d’armes de la marque. L’entreprise est reconnue pour la qualité de ses fusils de chasse, notamment les modèles Sagittaire, Impact LA ou encore les express Double Express, largement utilisés par les chasseurs français. Si la situation ne trouve pas d’issue favorable, l’avenir de la production et du service après-vente de ces armes pourrait être compromis. Une faillite ou un rachat par un groupe étranger pourrait entraîner des difficultés d’approvisionnement en pièces détachées, une hausse des prix ou même l’arrêt de certains modèles. Pour les chasseurs fidèles à la marque, cette incertitude pourrait les pousser à se tourner vers d’autres fabricants, modifiant ainsi le paysage du marché français des armes de chasse.